La maladie valvulaire mitrale
Lors d’une consultation, le vétérinaire a entendu un souffle cardiaque à l’auscultation du cœur de votre chien. Qu’est-ce que cela signifie ? Est-ce grave ? Est-ce que ça se soigne ? Mon chien va-t-il en mourir ? Ce document est fait pour vous aider à comprendre la pathologie dont souffre votre animal, bien cerner l’importance du traitement, prévoir et anticiper toute dégradation. Ce document n’est en aucun cas un document scientifique pour détailler de façon précise et complète cette pathologie. Il a plutôt comme but de « vulgariser » le fonctionnement de cette maladie afin que chacun puisse la comprendre.
Qu’est-ce qu’un souffle cardiaque?
Imaginez un tuyau d’arrosage en fonctionnement. A un endroit de ce tuyau, vous allez exercer un pincement avec votre pouce. L’écoulement de l’eau qui était fluide va être perturbé par le rétrécissement exercé par votre pouce. Vous allez ressentir des petites vibrations au bout de votre doigt causées par cette turbulence de l’eau. Dans le cœur de votre chien, c’est un peu le même principe qui s’opère. Le souffle entendu à l’auscultation est dû à la turbulence du sang qui passe par un endroit réduit. Celui-ci peut être soit un vaisseau légèrement obturé, bouché ; soit une valve qui n’est plus totalement étanche. Chez l’homme, le tabagisme, le cholestérol, l’hypertension, l’athérosclérose sont de nombreux facteurs qui peuvent conduire au rétrécissement ou à l’obturation de différents vaisseaux dont l’aorte. Chez le chien, ces problèmes sont beaucoup plus rares. Lorsqu’on entend un souffle chez un animal âgé, cela correspond quasiment toujours à la défaillance d’une valve, principalement la valve mitrale.

Quel est le rôle de la valve mitrale ?
Le cœur est une grosse pompe qui fait circuler le sang dans tout l’organisme. Un peu comme le circulateur d’un chauffage central qui envoi l’eau (chauffée par la chaudière) dans tous les radiateurs de la maison. Le sang a de nombreux rôles. L’un d’entre eux est de transporter l’oxygène, capté au niveau des poumons, et l’acheminer à tous les organes. On peut suivre et comprendre ce circuit sur le schéma ci-contre. Au niveau des poumons, le sang se charge donc d’oxygène. Il est ensuite aspiré dans l’oreillette gauche puis le ventricule gauche. Celui-ci se contracte et envoi le sang, par l’aorte, dans tout l’organisme distribuer l’oxygène. Ensuite le sang va revenir au cœur par l’oreillette droite cette fois, passer dans le ventricule droit et lors de la contraction du cœur, ce ventricule droit va « renvoyer » le sang dans les poumons. Et la boucle est bouclée !

Si on y regarde de plus près, le ventricule droit envoie le sang dans les poumons… qui sont juste à côté ! Cela n’est donc pas trop compliqué. En revanche, le ventricule gauche, lui, doit envoyer le sang dans tout l’organisme… du bout de la truffe, au bout de la queue. C’est lui qui fait le plus gros du travail. C’est pour cela que c’est largement lui le plus gros. Au moment de sa contraction, il faut que la totalité du sang soit bien envoyé dans l’aorte et ne retourne pas d’où il vient, càd l’oreillette gauche. Pour cela il y a un espèce de petit « clapet », une valve, qui ne laisse passer le sang que dans un sens, le sens oreillette – ventricule. Cette valve est ouverte lorsque le ventricule aspire le sang de l’oreillette puis elle se ferme lorsque le ventricule envoi le sang dans l’aorte.

Qu’est-ce que la maladie valvulaire mitrale ?
La valve mitrale, qui sépare l’oreillette gauche du ventricule gauche est donc très sollicitée. Elle doit résister à la pression énorme lors de la contraction du ventricule gauche. Elle est sollicitée à chaque contraction, çàd plus de 100 fois par minute, 6000 fois par heure, environ 150000 fois par jour 50 millions de fois par an… ½ milliard de fois sur la vie de votre chien. Avec le temps qui passe, cette valve peut fatiguer et perdre un peu de son étanchéité. A chaque contraction, elle laisse échapper un peu de sang qui retourne dans l’oreillette. C’est ce petit reflux sanguin, turbulent, que le vétérinaire entend avec son stéthoscope… c’est ça, le souffle cardiaque de votre chien.

Est-ce que c’est grave cette maladie ?
A chaque cycle, à chaque contraction du cœur, une petite portion du sang n’est pas envoyée dans la grande circulation pour distribuer l’oxygène. Cette quantité est très faible et le cœur va facilement adapter ce petit manque en se contractant légèrement plus vite, légèrement plus fort. Hormis dans les cas très graves, très avancés, ce manque d’envoi de sang oxygéné dans l’organisme va passer totalement inaperçu. Par contre, cette petite quantité de sang qui retourne dans l’oreillette gauche, même si elle est relativement faible va poser problème. En effet, à chaque cycle, cette oreillette gauche va recevoir le sang qui vient des poumons, mais également récupérer cette petite quantité de sang qu’il avait déjà envoyé dans le ventricule au battement précédant. Petit à petit, la pression va donc augmenter dans cette oreillette. Au contraire du ventricule qui a une paroi bien épaisse, l’oreillette a une paroi beaucoup plus fine. Elle ne va donc pas pouvoir contrôler cette augmentation de pression. Petit à petit, l’oreillette va se dilater, se déformer. Elle va écraser les structures autour d’elle, principalement une bronche qui passe juste à côté. Ce qui va produire de la toux chez votre animal. Cette toux est le premier signe que vous aller observer, alors qu’à ce stade, la maladie est déjà bien installée et le stade relativement avancé. C’est tout le problème de cette pathologie, elle est silencieuse et sournoise.

L’évolution de cette maladie
L’oreillette gauche va donc se dilater et écraser les structures autour d’elle. Cette dilatation va contenir l’augmentation de pression dans une certaine limite. Lorsque cette limite est atteinte, la surpression va remonter le circuit et entreprendre les vaisseaux pulmonaires qui amènent le sang au cœur. Ces vaisseaux vont à leur tour se dilater mais surtout, ils vont perdre de leur étanchéité et laisser passer un peu de liquide qui va s’infiltrer dans le tissu pulmonaire. Ceci s’appelle de l’œdème pulmonaire. Il va se manifester par une toux également mais plus forte et plus fréquente que celle causée par la dilatation de l’oreillette. On va aussi pouvoir observer avec cet œdème pulmonaire, une augmentation de la respiration qui peut devenir bruyante, ronflante. Votre chien va commencer à montrer une intolérance à l’effort. Il n’est plus capable de finir ses balades comme avant. Les déplacements deviennent laborieux et difficiles. Au stade final, le poumon est tellement rempli d’œdème, que la respiration devient difficile. La mort de l’animal se fera par une grosse détresse cardio respiratoire.

Comment contrôler cette maladie
Même si le diagnostic est assez facile : souffle cardiaque, chien âgé, souvent de taille petite à moyenne, petite toux de temps en temps… dans 99% des cas, on a bien affaire à une fatigue de la valve mitrale. Cela dit, seule l’échographie cardiaque permet un diagnostic de certitude. Une radiographie va permettre d’apprécier la dilatation du cœur et même plus précisément de l’oreillette gauche. Mais l’échographie est le seul examen qui va nous permettre d’aller voir à l’intérieur du cœur ce qu’il s’y passe. L’échographie doppler va permettre d’observer et d’évaluer les mouvements du sang dans le cœur. Nous pourrons donc visualiser ce reflux turbulant de la valve mitrale. On va pouvoir examiner la valve mitrale, sa forme, son épaisseur, ses cordages qui la maintiennent, son mouvement. Dans l’évolution de la maladie, on va pouvoir mesurer la taille de l’oreillette gauche et évaluer sa dilatation. Ce paramètre est sans aucun doute le plus important pour déterminer le stade d’avancement de la pathologie et la traiter en conséquence. Par exemple, on va pouvoir anticiper l’apparition de l’œdème pulmonaire et le traiter dès son apparition voir même éviter qu’il n’arrive. Ceci optimise largement le traitement augmente l’espérance de vie et améliore grandement le confort de vie de l’animal.
Quel est le traitement de cette maladie
Il existe plusieurs traitements possibles qui peuvent être fait séparément ou en association suivant le cas mais surtout suivant le stade de la maladie (qui est précisé par l’échographie). Les différentes molécules disponibles n’ont pas le même système d’action, c’est pour cela qu’il est parfois judicieux de les associer. Ceci étant dit, de l’avis de tous les plus grands spécialistes mondiaux, la molécule de choix dans le traitement de cette pathologie est le PIMOBENDANE. Cette molécule a principalement deux effets majeurs : un effet inotrope positif et une action vasodilatatrice. L’effet inotrope positif signifie une meilleure contraction des fibres du cœur. La vasodilatation des vaisseaux va diminuer la résistance de tout le système vasculaire facilitant le travail du cœur qui doit y envoyer le sang. Mais aussi dilater les vaisseaux qui alimentent le cœur lui-même. Celui-ci sera donc mieux oxygéné et donc plus efficace.
Une énorme étude de terrain a comparé des lots d’animaux avec cette pathologie à différents stades. Certains ont reçu un traitement avec du pimobendane, d’autre pas. Cette étude montre une augmentation majeure de l’espérance de vie et retarde largement l’apparition des signes cliniques des animaux ayant reçu un traitement. Lorsque l’œdème pulmonaire va s’installer, le traitement pourra notamment être complété avec des diurétiques.
Suivi de cette maladie
Il est important de contrôler l’évolution de la pathologie régulièrement avec une échographie cardiaque. Celle-ci devrait être réalisée tous les 6 à 12 mois. Par contre, si des signes apparaissent à la maison montrant une possible évolution, cet examen devra être réalisé dans un délai plus court. Les observations qui pourraient vous indiquer une aggravation son principalement au nombre de trois.
Sa respiration au repos s’accélère. Une fois par semaine, je vous conseille de compter le nombre de respirations (nombre de fois ou le thorax se soulève) par minute. Il doit être inférieur à 30. Une augmentation nette de ce chiffre d’une semaine à l’autre doit aussi être un signe d’alerte.
Si votre chien se met à tousser alors qu’il ne toussait pas avant ou une toux déjà présente qui s’amplifie.
Si votre animal présente une intolérance à l’effort. C’est-à-dire qu’il a plus de mal à finir les balades qu’il finissait sans peine, qu’il joue moins longtemps dans le jardin…

Venez en discuter!
Si vous avez lu cette fiche jusqu’au bout, c’est que cette maladie vous intéresse. Peut-être avez vous remarqué certains signes évocateurs chez votre chien et cela vous inquiète. Venez en discuter avec nous. Plus cette maladie est prise en charge tôt, mieux elle est contrôlée.